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Tarification du carbone en hausse : comment et pourquoi mesurer l’empreinte carbone de votre activité hôtelière ou touristique?

posted on 8:26 AM, October 4, 2021
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Par Angela Nagy

 

Suite à la réélection d’un gouvernement libéral minoritaire au Canada, la tarification du carbone, soutenue par un large éventail d’universitaires, de dirigeants du secteur public, du secteur de l’énergie et d’autres chefs d’entreprise, n’est pas près de disparaître et ne cesse d’augmenter. Si vous cherchez à mieux comprendre les risques et les opportunités qui accompagnent la hausse de la tarification du carbone, poursuivez la lecture et découvrez comment et pourquoi mesurer l’empreinte carbone de votre entreprise.

Depuis 2019, chaque juridiction au Canada fixe un prix pour la pollution par le carbone et actuellement, la tarification fédérale du carbone est fixée à 30 $ par tonne d’équivalent-dioxyde (CO2e). En 2022, cette tarification grimpera à 50 $ par tonne, et d’ici 2030, elle atteindra 170 $ par tonne de CO2e.

Pour situer le contexte, d’ici 2030, la taxe carbone sur les combustibles fossiles couramment utilisés par les hôtels et autres entreprises et organisations touristiques, notamment les OMD, se présentera comme suit :

  • Un gigajoule (GJ) de gaz naturel ~ 8,84 $/GJ
  • Un litre (L) d’essence ~ 0,42 $/L
  • Un litre (L) de diesel ~ 0,47 $/L
  • Un kilowattheure (kWh) d’électricité ~ les coûts varieront en fonction du mode de production de l’électricité – les réseaux basés sur le charbon et le gaz naturel enregistreront les plus fortes augmentations

D’ici 2030, la tarification du carbone entraînera une hausse de 30 à 100 % de vos coûts d’exploitation liés aux combustibles fossiles, sans compter les augmentations de coûts imputables à l’inflation. Pour anticiper le risque carbone pour votre entreprise, vous devez comprendre votre empreinte carbone et élaborer un plan en vue de la réduire.

Mesurer son empreinte carbone n’est en réalité pas si compliqué, et à l’instar des normes de comptabilité financière, il existe des normes de comptabilisation des gaz à effet de serre (GES). La plupart des entreprises du secteur du tourisme suivent la norme du Protocole sur les gaz à effet de serre relative à la comptabilité et à la présentation des rapports des entreprises publiée par le World Resources Institute (WRI) et le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD). Il s’agit de l’outil de comptabilisation international le plus largement utilisé par les gouvernements et les chefs d’entreprise du monde entier pour comprendre, quantifier et gérer les émissions de GES.

Sur la base de ces normes, cinq étapes clés vous permettront de mesurer votre empreinte carbone :

 

Étape 1. Déterminez vos limites organisationnelles et opérationnelles

Vos limites organisationnelles déterminent les entités et les installations commerciales à inclure dans votre inventaire de GES. Lors de l’établissement des limites organisationnelles, deux approches de consolidation sont utilisées pour déclarer les émissions de GES : le contrôle et la part de capitaux propres.

Dans l’approche fondée sur le contrôle, une organisation déclare 100 % des émissions de GES provenant des activités qui sont sous son contrôle. L’organisation ne comptabilise pas les émissions de GES des activités dans lesquelles elle peut détenir une participation mais sur lesquelles elle n’a aucun contrôle. Le contrôle est défini comme étant soit financier, soit opérationnel.

Contrôle financier : Une organisation détient le contrôle financier de l’opération si elle est en mesure de diriger les politiques financières et opérationnelles pour obtenir des avantages économiques des activités liées à cette opération.

Contrôle opérationnel : Une organisation détient le contrôle opérationnel de l’opération si elle a le pouvoir de mettre en œuvre les politiques opérationnelles dans le cadre de l’opération.

Dans l’approche basée sur la part de capitaux propres, une organisation comptabilise les émissions de GES provenant de ses opérations en fonction de sa part de capitaux propres dans ces dernières. Les capitaux propres reflètent l’intérêt économique, à savoir l’étendue des droits d’une entreprise sur les risques et les avantages découlant d’une opération. La part de capitaux propres est généralement la même que le pourcentage de participation à l’opération.

 

Étape 2. Déterminez votre année de déclaration et votre année de référence

Pour effectuer une comparaison pertinente des émissions dans le temps, votre organisation doit sélectionner une norme de rendement qui servira de référence pour les émissions actuelles. C’est ce qu’on appelle l’année de référence.

L’année de référence peut être soit l’année civile, soit l’année fiscale de votre organisation. Quelle que soit l’année de référence retenue, les mêmes dates doivent être utilisées pour les futurs inventaires d’émissions de GES afin d’assurer une certaine cohérence. L’importance de cette cohérence devient évidente lorsqu’il est question de suivre les progrès réalisés en vue d’atteindre un objectif de réduction des GES et de les comparer à l’année de référence.

 

Étape 3. Sélection des sources d’émissions qui s’appliquent à votre organisation

Après avoir défini les limites organisationnelles, vous devez définir les limites opérationnelles de votre entreprise. Notez que les limites opérationnelles sont différentes des limites organisationnelles, dans la mesure où vous décidez quelles sources d’émissions au sein de votre organisation vous allez suivre et essayer de réduire. La façon la plus simple de procéder est de considérer toutes les sources d’émissions de votre entreprise (chauffage, climatisation, voyages d’affaires, trajets domicile-travail des employés) avant de sélectionner celles que vous allez déclarer.

Émissions directes et indirectes

Les émissions de GES sont générées par diverses activités des entreprises, telles que le chauffage et l’éclairage des bureaux ou les déplacements pour se rendre à des réunions. Comme le définit le Protocole sur les gaz à effet de serre, les GES d’une entreprise sont classés en deux catégories : les émissions directes et les émissions indirectes.

Les émissions directes sont générées par des sources appartenant à votre entreprise, telles que les voitures de fonction ou les chaudières au gaz naturel. À des fins de comptabilisation, les émissions directes sont appelées émissions de portée 1.

Les émissions indirectes sont des émissions qui résultent des activités de votre organisation mais dont les sources sont détenues ou contrôlées par une organisation distincte. Par exemple, votre organisation peut être propriétaire de ses ordinateurs et de ses photocopieurs, mais l’électricité utilisée pour alimenter le matériel de bureau est produite par la société de distribution d’électricité.          

Les émissions indirectes sont subdivisées en émissions de portée 2 et de portée 3. Les émissions de portée 2 résultent de l’utilisation d’électricité, de vapeur ou de chaleur achetées. Les émissions de portée 3 comprennent toutes les autres émissions indirectes, telles que celles liées aux déplacements professionnels dans des véhicules n’appartenant pas à l’entreprise, aux trajets domicile-travail des employés, à l’utilisation du papier, à l’élimination des déchets et aux activités externalisées.

 

Étape 4. Identifiez les données que vous devez collecter et comment les suivre dans le temps.

Deux types de données devront être recueillies afin de calculer les émissions de GES de votre organisation : les données sur les activités et les facteurs d’émission.

Données sur les activités

Ces données quantifient une activité – c’est-à-dire l’électricité consommée, les déplacements professionnels effectués, la quantité de déchets produits – en unités qui seront utilisées pour calculer les émissions de GES. L’une des méthodes de collecte des données sur les activités consiste à conserver les informations dans un emplacement central, à l’instar de la tenue de livres à des fins comptables. Les exemples suivants identifient les types d’activités pour lesquelles vous voudrez recueillir des données :

  • Litres d’essence
  • Kilowattheures d’électricité
  • Miles/kilomètres aériens parcourus dans le cadre de l’activité professionnelle
  • Mètres cubes de gaz naturel

Lors de la collecte des données d’activité, il est important de garder à l’esprit que votre organisation est susceptible de ne pas être responsable de toutes les émissions d’une activité particulière. Par exemple, si vous louez un espace de bureau qui est partagé par deux entreprises, il faut en tenir compte dans le calcul. De même, le covoiturage permet de réduire les émissions liées au trajet domicile-travail des employés, puisque le véhicule transporte plus d’une personne. Ne pas tenir compte de ces pourcentages peut entraîner une surestimation des émissions de GES.

Facteurs d’émissions

Les facteurs d’émissions sont des valeurs qui convertissent les données sur les activités en émissions de GES. Les facteurs d’émissions sont propres à la source. Autrement dit, il existe un facteur d’émissions propre à chaque activité que vous essayez de convertir en émissions de GES. Par exemple, un facteur d’émissions pour l’électricité produite par la combustion du charbon sera plus élevé qu’un facteur d’émissions pour l’électricité produite par un barrage hydroélectrique. Il est important d’obtenir les données les plus détaillées possibles sur l’activité afin de s’assurer que le bon facteur d’émissions est utilisé.

Les facteurs d’émissions sont publiés par diverses institutions, notamment les gouvernements locaux, provinciaux et fédéral, et les agences intergouvernementales. Ces facteurs d’émissions étant régulièrement mis à jour, il est indispensable de rester à jour et d’utiliser les valeurs les plus récentes. L’équation de base pour calculer les émissions de GES à l’aide de vos données sur les activités et des facteurs d’émissions est la suivante :

Données sur les activités x facteurs d’émissions = émissions de GES

La recherche et la mise à jour de ces facteurs d’émissions, puis le calcul de chaque source d’émissions, constituent l’un des aspects les plus délicats de la comptabilité carbone. Pour ce faire, il est possible de créer une feuille de calcul Excel, ou de recourir à des outils qui vous aideront dans cette tâche, tels que le logiciel EcoBase Carbon de GreenStep, qui comprend les facteurs d’émissions pour les sources d’émissions les plus courantes. Il vous suffit de confirmer les activités pour lesquelles vous souhaitez saisir des données, puis de les saisir, pour mesurer votre empreinte carbone.

 

Étape 5. Préparez un rapport

Une fois que vous avez mesuré votre empreinte carbone, vous pouvez simplement en assurer le suivi dans Excel ou à l’aide d’un logiciel carbone en ligne, mais la meilleure pratique consiste à partager vos émissions de GES, ainsi que vos progrès en matière de réduction des émissions, en interne et en externe en préparant un rapport sur vos émissions de GES. Un rapport crédible présente des informations précises, complètes, cohérentes et transparentes. Bien qu’il existe diverses normes en la matière, votre rapport sur les émissions doit être rédigé conformément à la norme du Protocole sur les GES relative à la comptabilité et à la présentation des rapports des entreprises.

 

Prochaines étapes : Réduire et répéter

Mesurer et déclarer son empreinte carbone n’est que le premier pas, et il faut s’y tenir chaque année. Dans mon prochain article, j’aborderai les questions de la fixation d’objectifs de réduction, de la création d’une stratégie pour atteindre ces objectifs et réduire les émissions, et des moyens qui vous permettront de compenser la totalité ou une partie de votre empreinte carbone sur la voie de la neutralité carbone. En attendant, n’hésitez pas à contacter notre équipe si vous avez des questions sur la marche à suivre pour commencer à mesurer et à réduire votre empreinte carbone.

Cet article a été initialement publié sur le blogue de GreenStep consacré au tourisme durable.

Angela Nagy est la présidente-directrice générale de GreenStep Solutions. Par l’entremise de leur division Tourisme durable, son équipe et elle accompagnent les entreprises et les destinations touristiques pour les aider à mesurer, améliorer et certifier leur rendement en matière de durabilité.